Valérie Demon: chef-d'œuvre en péril
La monarchie espagnole va mal. Elle découvre, avec lenteur, que les Espagnols ne la placent plus sur un piédestal. Autrefois épargnée par les scandales, cette institution n’échappe plus aux reproches et à la colère de ses sujets. La maison royale subit, comme les autorités politiques, le climat de défiance ambiant.
En l’occurrence, la monarchie a tout fait pour galvauder sa légitimité et sa crédibilité. Personne n’a forcé Juan Carlos à aller abattre des éléphants au Botswana, alors que la crise financière menaçait de faire vaciller l’Espagne. Et que dire du gendre du roi mis en examen pour détournement de fonds publics. Et voilà enfin la fille cadette de Juan Carlos soupçonnée de blanchiment de capitaux et de fraude fiscale. Elle devra se présenter devant le juge d’ici quelques semaines. C’est finalement la seule bonne nouvelle pour la démocratie. Même une infante ne peut échapper à la justice.
En revanche, ces déboires le démontrent: le roi d’Espagne n’a plus l’autorité nécessaire pour remettre de l’ordre dans sa famille. Celle qu’il avait eue par exemple pour faire échec à la tentative de coup d’Etat en 1981. Or, la monarchie n’a de sens en Espagne que si elle est utile. Juan Carlos a marqué son pays, en bien. Il a mené la transition démocratique vers cette monarchie constitutionnelle à laquelle une bonne moitié des Espagnols restent attachés malgré tout.
Mais le vent menace de tourner. Car selon ce récent sondage, deux tiers d’entre eux estiment que le roi a fait son temps. Il devrait donc rendre ce dernier service à son pays: abdiquer pour laisser une chance à son fils, le prince Felipe, de sauver la monarchie. Juan Carlos risque sinon de rester dans l’histoire comme son fossoyeur.
Valérie Demon