En l’an 2000, il y avait en Suisse quelque 400 hôpitaux. IIs ne seront guère plus de 50 ou 70 à l’horizon 2030. A la Chaux-de-Fonds, par exemple, la population craint un risque pour la sécurité sanitaire. Elle est descendue dans la rue pour défendre ses services de proximité, en particulier les urgences, déplacées à Neuchâtel. Mais le mouvement est en marche partout en Suisse et le secteur hospitalier est en train de vivre la plus formidable restructuration jamais entreprise. Les hôpitaux publics et privés sont mis en concurrence. Et pour l’heure, le privé semble être le principal bénéficiaire de cette mutation.
La révision de la loi sur le financement des hôpitaux visait à abaisser les coûts de la santé et donc les primes d’assurance, grâce à la concurrence. Pour l’instant, on en est encore loin. En revanche, cette modification entrée en vigueur en 2012 a déclenché dans tous les cantons une réorganisation d’envergure du paysage hospitalier. Des hôpitaux ferment, des cliniques privées s’installent, des services sont déplacés, d’autres sous-traités et les conditions de travail du personnel se durcissent.
Une équipe de "Temps présent" a observé cette mutation de près. En suivant notamment les exemples des cantons de Fribourg et de Neuchâtel, ce reportage montre à quel point les hôpitaux publics sont aujourd’hui sous pression. Chaque année, les tarifs hospitaliers sont négociés, le plus souvent à la baisse, entre caisses maladie et hôpitaux. Désormais, les hôpitaux publics sont en concurrence les uns envers les autres mais aussi avec les cliniques privées. Ils doivent faire des choix, se spécialiser, abandonner certaines activités, en rationnaliser d’autres. Les décisions sont douloureuses. Et la population réagit, descend dans la rue, comme à la Chaux-de-Fonds en début d’année. Même si les autorités médicales s’en défendent, des chefs de service s’alarment de ce que le déplacement des urgences à Neuchâtel puisse faire courir un risque pour la sécurité des patients du haut du canton.
Dans ce vaste chantier, les groupes de cliniques privées – Hirslanden (1,4 milliard de francs de chiffre d’affaires) ou Genolier (430 millions) – sont à l’affût. Il faut dire que le marché hospitalier représente quelque 25 milliards de francs. Et la révision légale les comble, puisque elle permet aux établissements privés de bénéficier de financements publics.
Rediffusions le vendredi 4 septembre à 00:30 et lundi 7 septembre à 16:25 sur RTS Deux.
Un reportage de Pietro Boschetti et Jean-Bernard Menoud
Image: Séverine Barde Son: Marianne Roussy Montage: Catherine Kala