Et vogue la Dzingolaise
Se laisser pousser par le vent, dériver hors du temps et se bercer de lenteur en tirant quelques bords sur le Léman, ce sont ces moments où le temps semble suspendu que la cochère offre à ses passagers et son équipage. Cette cochère est la réplique d’une de ces embarcations de travail qui transportaient des marchandises ou des matériaux de construction d’une rive à l’autre du Léman entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle et qui ont toutes disparus depuis, avant que des passionnés de patrimoine nautique décident de lui redonner vie.
Certains ajoutent même que les cochères étaient comparables aux camionnettes de livraison d’aujourd’hui  par rapport aux grandes barques qui étaient, elles, les camions du lac. Tous ces bateaux ont des voiles latines, un héritage des Savoyards qui les ont introduites sur le Léman au XIIIème siècle en confiant à des charpentiers navals de Méditerranée la construction de leurs bateaux.
Au début des années 2000, le patrimoine nautique revient au goût du jour et un mouvement de sauvegarde des bateaux anciens se propage de la Bretagne  jusqu’au bord du Léman. Des associations se constituent pour restaurer ou reconstruire d’anciennes embarcations et Saint Gingolph n’échappe pas à cet engouement.
Pierrot Duchoud, collectionneur de cartes postales anciennes, passionné par l’histoire de St Gingolph est l’instigateur de la reconstruction à l’identique d’une cochère, bateau beaucoup plus petit que les grandes barques lémaniques, telles que la Neptune à Genève ou la Vaudoise à Ouchy, mais bien adapté à la taille du port. Cette réplique verra le jour en octobre 2000 dans le chantier naval de Pierre-Marie Amiguet.
Ses proportions lui permettant d’être facilement déplacée, la cochère se fait parfois l’ambassadrice du Léman dans des manifestations dédiées au patrimoine naval, comme lorsqu’elle se rend à Sanary Sur Mer, près de Toulon, qui fête les fameux pointus marseillais, des bateaux de pêche traditionnels qui ont failli, eux aussi, disparaître. Une sorte de retour aux origines puisque la cochère et les pointus ont en commun leur voile latine. Un patrimoine flottant qui évoque le temps pas si lointain où ces embarcations  étaient un outil de travail, bien différent  du monde de la plaisance d’aujourd’hui.  
Un reportage de Nicole Weyer