A Oberwil, le pont va permettre d'éviter une prairie dangereuse en hiver. [Raphaël Engel - RTS]

Mon chemin dans les nuages - Et vogue la Dzingolaise

L'émission du 16 octobre 2015

Mon chemin dans les nuages

Les passerelles suspendues sont de plus nombreuses en Suisse. Pour le bonheur des touristes, mais aussi parfois par nécessité pour les riverains. Au coeur de l’Oberland bernois, "Passe-moi-les Jumelles" explore deux passerelles devenues salutaires pour ceux qui habitent près du vide.

Ainsi une famille de Frutigen a fait construire ce qui fut un temps le plus long pont suspendu d’Europe, ouvrant à ses enfants un passage sur le chemin de l’école mais aussi vers une nouvelle vie. La famille Wäfler de Frutigen ne s’était pas doutée du succès touristique qu’allait rencontrer "son" pont suspendu long de plus de 100 mètres. Grâce à cette construction suspendue à 40 mètres du sol, les parents ont pu quitter leur emploi et se recycler dans un nouveau métier: aubergistes, gardiens de leur pont privé.

Christian Haueter est le père spirituel du pont suspendu d'Oberwil. [Raphaël Engel - RTS]Dans une autre vallée de l’Oberland bernois, le Simmental, ce sont les avalanches qui ont convaincu le paysan Christian Haueter qu’un pont était devenu indispensable. Aujourd’hui, lorsqu’il neige, le pont suspendu à 111 mètres au-dessus du vide ouvre un accès au bétail, évitant la meurtrière "prairie aux échelles".
Ces deux ponts et bien d’autres sont l’oeuvre du Bernois Theo Lauber, spécialiste des câbles tendus entre les montagnes. Un rêveur qui imagine que le monde serait meilleur avec plus de ponts, « des milliers de pont … ». Où qu’il aille, l’ingénieur-poète imagine des ponts suspendus, traçant comme un sourire à travers les paysages verticaux. Il complète le portrait de cette Suisse ingénieuse et entreprenante.

Reportage de Raphaël Engel

Et vogue la Dzingolaise

Se laisser pousser par le vent, dériver hors du temps et se bercer de lenteur en tirant quelques bords sur le Léman, ce sont ces moments où le temps semble suspendu que la cochère offre à ses passagers et son équipage. Cette cochère est la réplique d’une de ces embarcations de travail qui transportaient des marchandises ou des matériaux de construction d’une rive à l’autre du Léman entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle et qui ont toutes disparus depuis, avant que des passionnés de patrimoine nautique décident de lui redonner vie.

Anne Delacoste, batelière. [Jay Louvion - RTS]Certains ajoutent même que les cochères étaient comparables aux camionnettes de livraison d’aujourd’hui  par rapport aux grandes barques qui étaient, elles, les camions du lac. Tous ces bateaux ont des voiles latines, un héritage des Savoyards qui les ont introduites sur le Léman au XIIIème siècle en confiant à des charpentiers navals de Méditerranée la construction de leurs bateaux.
Au début des années 2000, le patrimoine nautique revient au goût du jour et un mouvement de sauvegarde des bateaux anciens se propage de la Bretagne  jusqu’au bord du Léman. Des associations se constituent pour restaurer ou reconstruire d’anciennes embarcations et Saint Gingolph n’échappe pas à cet engouement.

Pierrot Duchoud, collectionneur de cartes postales anciennes, passionné par l’histoire de St Gingolph est l’instigateur de la reconstruction à l’identique d’une cochère, bateau beaucoup plus petit que les grandes barques lémaniques, telles que la Neptune à Genève ou la Vaudoise à Ouchy, mais bien adapté à la taille du port. Cette réplique verra le jour en octobre 2000 dans le chantier naval de Pierre-Marie Amiguet.

La Neptune et l'Aurore. [Jay Louvion - RTS]Ses proportions lui permettant d’être facilement déplacée, la cochère se fait parfois l’ambassadrice du Léman dans des manifestations dédiées au patrimoine naval, comme lorsqu’elle se rend à Sanary Sur Mer, près de Toulon, qui fête les fameux pointus marseillais, des bateaux de pêche traditionnels qui ont failli, eux aussi, disparaître. Une sorte de retour aux origines puisque la cochère et les pointus ont en commun leur voile latine. Un patrimoine flottant qui évoque le temps pas si lointain où ces embarcations  étaient un outil de travail, bien différent  du monde de la plaisance d’aujourd’hui.  

Un reportage de Nicole Weyer