L'industrie textile et l'esclavage moderne
Changer de vêtements au fils des saisons, suivre la dernière mode, la dernière tendance, acheter des habits que l'on ne mettra parfois que deux fois. On est dans le règne de la fast fashion. Un terme qui désigne le renouvellement rapide des collections d'articles vestimentaires. Ce mode de consommation d'habits pour ainsi dire jetables est basé avant tout sur le facteur prix. Les articles doivent être le meilleur marché possible. Et pour réduire leurs coûts et proposer des vêtements à prix cassés, les grandes marques n'hésitent pas à délocaliser.
Les habits bons marchés ont envahi les rayons des grands magasins. Pour preuve, il est possible de trouver des débardeurs à 3.50 CHF! Comment peut-on proposer des vêtements à des prix si bas? Pour le comprendre, notre équipe s'est rendue dans des pays producteurs. Turquie, Roumanie, Bangladesh: là-bas, les salaires et les conditions de travail n'ont rien à voir avec ce qui est pratiqué en Europe de l'Ouest. Les rémunérations sont généralement en deçà d’un salaire de subsistance et la sécurité des ouvriers n'est pas toujours assurée. A cela s'ajoutent des pressions pour augmenter la productivité et dans certaines usines, diverses formes de harcèlement visant principalement les collaboratrices.
Il serait pourtant possible de mieux faire. L'Organisation Internationale du Travail (OIT) a par exemple mis en place un programme, « Better Work », qui combine des évaluations indépendantes dans les usines avec un dialogue sociale entre ouvriers, employeurs, grandes marques et responsables gouvernementaux. Un programme qui a fait ses preuves dans plus de 250 usines au Vietnam notamment, où les ouvriers travaillent dans de meilleures conditions, et où les usines concernées ont vu leurs profits augmenter de 8% l’an dernier.
Les conditions de travail dans le secteur textile: l'état des lieux avec Françoise Weilhammer, journaliste et productrice à ABE
En Europe de l'Est, les ouvrières textiles survivent
Les habits "made in Europe" ne sont pas la panacée. Les ouvriers et ouvrières du secteur textile en Europe de l'Est touchent généralement des salaires en deçà du salaire de subsistance, avoisinant les 140 € par mois. Impossible de vivre dignement avec un tel revenu. A cela s'ajoute la pénibilité de la tâche, les heures supplémentaires et le travail parfois obligatoire les samedis et certains jours fériés. A Bucarest, l'équipe d'A Bon Entendeur peine à obtenir des témoignages. Les employés ont peur de perdre leur emploi.
C'est finalement Adriana, une ouvrière faisant partie du syndicat Alfa qui acceptera de répondre à nos questions. Avec ses trente-deux ans d'ancienneté, cette ouvrière touche 280 CHF brut par mois pour une cinquantaine d'heures de travail par semaine. Une somme qui lui permet à peine de survivre. Pour s'en convaincre, il suffit de se rendre avec elle au supermarché. L'alimentation pour une semaine dévore déjà pas moins de 17% de son salaire!
Pourtant il est possible de faire produire des vêtements dans de meilleures conditions. Exemple en Turquie, où notre équipe a suivi le directeur du développement durable de Switcher. Chez l’un de ses fournisseurs, dans la grande banlieue d’Istanbul, les salaires des ouvriers oscillent entre 480 et 720 CHF par mois. Et les conditions de travail n'y sont pas mauvaises. La sécurité des ateliers, l'accès aux sorties de secours, les équipements de protection individuelle, la lumière: tout a été révisé pour correspondre aux exigences de la petite marque suisse. Il faut dire que la directrice de l’usine turque a suivi plusieurs formations au quartier général de Switcher à Lausanne. En matière de salaire, Switcher est aussi en train de lancer un projet pilote. L’idée est de capitaliser 1% du prix d’achat que paie Switcher à ses fournisseurs pour le reverser directement aux employés, une fois par an. Si ce concept était appliqué à cette usine turque, l'argent redistribué représenterait un demi mois de salaire par ouvrier de plus par an. Mais ce genre d'initiatives reste l'exception.
L'origine des vêtements: le test
Pour ce test, nous avons acheté un échantillon de 12 vêtements dont les prix varient entre 3.50 et 179 CHF. Pour ces douze vêtements, nous avons posé deux questions simples aux marques les commercialisant: quel est le salaire de l’ouvrière qui a cousu ce vêtement? Dans quelles conditions a-t-elle travaillé?
Le consommateur peut-il aider les ouvriers du monde du textile? L'avis de Françoise Weilhammer, journaliste et productrice à ABE
Notre rubrique: arnaque à la carte de la ville
Madame Anne-Lise Noz, patronne de la chocolaterie du même nom, a échappé à une tentative d'arnaque. Un jour, une femme la contacte afin de vérifier si les informations sur la chocolaterie en sa possession étaient correctes. La raison? L'encart publicitaire de la chocolaterie qui doit figurer sur la carte de la ville de Lausanne. Madame Noz ne comprend pas. Elle n'a rien demandé. Là, la démarcheuse téléphonique lui dit posséder un contrat! Mme Noz en demande une copie avant de se prononcer. Le document qu'elle reçoit a tout d'un faux! Ce que confirmera l'office du tourisme de la ville, éditeur officiel de la fameuse carte de la ville.