Les lingettes inondent le marché. Dans ce secteur, les fabricants débordent d'imagination, la gamme ne cesse de se décliner. Pourtant, ces lingettes cachent parfois des produits peu recommandables pour la santé, et ne sont pas sans impact sur l'environnement.
Certaines lingettes peuvent s'avérer problématiques d'un point
de vue toxicologique. Elles contiennent parfois des agents
allergènes, et systématiquement des conservateurs, dont les effets
peuvent être tout à fait indésirables.
Lingettes pour
bébés
Du côté des lingettes pour bébé, une seule de celles analysées par
ABE contient un agent potentiellement allergène: la lingette
Penaten, dont l'agent est toutefois reconnu comme peu fréquemment
allergène. Toutes contiennent des agents conservateurs,
indispensables pour éviter le développement de bactéries et de
moisissures. Certaines affichent jusqu'à huit conservateurs
différents, notamment des parabens, dont certains sont soupçonnés
d'être des perturbateurs endocriniens. Marie-France Corre : «
On conseille d'éviter aujourd'hui l'isobutylparaben et le
butylparaben [...] qui sont les plus incriminés aujourd'hui. Les
autres ne posent pas de problèmes et pour l'instant sont
complètement utilisés sans aucune difficulté par les cosméticiens.
» De l'isobutylparaben et du butylparaben sont annoncés dans
Nivea Baby Pure. Notre expert toxicologue a également relevé la
présence de méthylisothiazolinone dans Huggies Pure. Le Dr Daniel
Perrenoud, dermatologue spécialiste des allergies, a quelques
réserves sur ce produit : « Le risque allergénique est lié à sa
concentration, on n'aime pas le voir dans les produits qui sont pas
rincés, qui vont rester sur la peau. [La méthylisothiazolinone] a
quand même été un des chefs de file des substances allergisantes en
Europe il y a quelques années. »
Autres agents conservateurs qui peuvent poser problème, les
libérateurs de formol. Ils libèrent du formaldéhyde, un cancérogène
respiratoire, déjà présent dans notre environnement, par exemple
dans les colles du mobilier, dans les peintures ou encore dans les
revêtements. Un libérateur de formol est annoncé dans Pampers
Lavender, Coop Prix Garantie, M-Budget, Penaten, Millette Baby Care
Lavendel et Nivea Baby Pure. Il y en a même deux dans Leader Price.
Deux lingettes n'en contiennent pas du tout: Denner et Huggies
Pure. Les lingettes pour bébés, bien pratiques au demeurant,
présentent donc quelques points noirs. Sont-elles utilisées dans
les crèches, par exemple ? Capucine Ratajski : « Non,
principalement pour des raisons de santé. Nous privilégions l'eau
et le savon. » Avec quarante enfants qu'il faut changer quatre
fois par jour, l'utilisation de lingettes impliquerait une
augmentation des coûts et des déchets considérable.
Lingettes
démaquillantes
Zoé Revital, Corine de Farme, Diadermine et Bébé Young Care
n'annoncent aucun allergène. Les lingettes Yves Rocher en annoncent
quatre, dont un classé comme fréquemment allergène. Demaq'expert
sept, dont deux fréquents et Nivea Visage, neuf, dont trois
fréquents. Ces chiffres ne sont pas le seul facteur déterminant
pour la toxicité des lingettes. Dr Daniel Perrenoud : « Pour
conserver un effet parfumé et diminuer le risque [les fabricants]
mélangent en très petites quantités des parfums. [...]Vous pouvez
avoir un produit qui ne contient qu'une ou deux molécules
parfumantes mais en haute concentration qui sera beaucoup plus
allergisant qu'un produit qui en contient dix, en très faible
concentration. » Toutes ces lingettes contiennent également
des conservateurs. Yves Rocher annonce du butylparaben, un des
parabens soupçonnés d'être perturbateur endocrinien. Corine de
Farme annonce du méthylisothiazolinone, un conservateur allergène
dont la présence est ennuyeuse dans la mesure où l'on ne rince pas
la peau après avoir utilisé cette lingette démaquillante. Quant au
précurseur de formol, on en a trouvé un dans Nivea Visage, Zoe
Revital, Diadermine, Bébé Young Care, Demaq'expert. Yves Rocher
Pure et Corinne de Farme en sont exempts.
L'inventaire des lingettes sur le marché révèle une abondance
étonnante. Comme souvent en Suisse, il est toutefois difficile de
trouver des statistiques permettant d'établir l'impact écologique
de cette profusion. En revanche, l'observatoire bruxellois de la
consommation durable avait mené, il y a quelques années, une
enquête très intéressante sur ces lingettes.
Un symbole de la société du
gaspillage
Il a imaginé des scénarios de consommation pour évaluer les
surplus de coût et de production de déchets entraînés par la
consommation de lingettes. Si un ménage se met à utiliser des
lingettes pour l'entretien de la maison, il va produire 14,7 kg de
déchets et ce choix lui coûtera environ 15 fois plus cher qu'avec
une méthode classique de nettoyage. S'il adopte le mode lingette
aussi pour son hygiène corporelle et l'entretien de son linge, on
atteint un total de 58 kg/an de déchets ménagers supplémentaires,
la plus grande partie non récupérables. Et si la famille a le
bonheur de s'agrandir avec un bébé, cela fera une moyenne de 3650
lingettes de plus par an, soit 23 kg de déchets supplémentaires. A
cette accumulation de déchets s'ajoutent l'augmentation de
ressources utilisées et d'énergie consommée pour la production et
le transport. René Longet : « Cela me fait penser
qu'aujourd'hui, tout le monde est pour le développement durable,
mais qu'il y a encore un grand chemin à faire. Il s'agit vraiment
d'un produit qui ne répond à aucun besoin [...] On ne peut
absolument pas le récupérer comme le papier, le verre... c'est
vraiment le symbole de la société du gaspillage. »
Les
micropolluants
C'est en effet à la poubelle que sont destinées les lingettes
après usage, y compris le papier toilette humide. Il ne faut pas le
jeter dans la cuvette. En effet, vu sa texture, il se désagrège
moins bien que le simple papier toilette et peut boucher les
canalisations. Philippe Phillot :
« C'est le geste facile effectivement, on tire l'eau, ça
disparaît, c'est plus chez nous et à ce moment-là on ne s'occupe
plus du problème. [...] A Neuchâtel par exemple, on traite à peu
près 24 000 m3 d'eaux usées par jour. Là-dedans il faut aller
rechercher ces lingettes et ces pollutions. » Cette épuration
se fait grâce à un grillage assez grossier, puis un tamis plus fin.
Ces déchets seront ensuite incinérés. Les lingettes mêlées aux eaux
usées, en plus d'augmenter le travail d'épuration des eaux,
contribuent à aggraver un problème qui inquiète beaucoup les
autorités et les scientifiques: l'eau qui sort des stations
d'épuration n'est pas aussi propre qu'on le pensait jusqu'à
récemment.
Sept lingettes ont passé un test de Ktipp et Kassensturz repris
par ABE. Elles étaient évaluées en fonction de trois critères : la
résistance, la douceur et la présence d'additifs nocifs pour la
santé.
Le verdict :
- Duckies de Carrefour, doux,
résistant et sans additif douteux. Note : 6, la meilleure du test,
très bon.
- Charmin de Carrefour, très
résistant et aussi doux. Note : 5.9, très bon aussi. Ces deux
produits sont les plus chers du test : 10 francs les 100 lingettes
pour Duckies et 8,23 francs pour Charmin, soit 8 à 10 fois plus
cher que le produit testé le meilleur marché.
- M-Budget n'a pas été jugée assez
souple. Note générale : 4.3, suffisant.
- Lingettes humides de Denner avec
camomille ne sont pas très douces non plus. Note : 4.2,
suffisant.
- Coop Prix Garantie : souple et
résistant, mais le laboratoire a trouvé des formaldéhydes : 30 mg
par kilo. Note globale : 3.9, insuffisant.
- Soft, de la Migros : contient
aussi du formaldéhyde 48 mg par kilo. Note finale : 3.6,
insuffisant.
- Camomille, de Coop : 52mg par
kilo de formaldéhyde, et 19mg par kilo de composés halogénés
organiques. Résultat la plus mauvaise note du test 3,
insuffisant.
Le bilan écologique et toxicologique des lingettes encourage à
ne pas à en abuser. Elles peuvent être utile comme solution de
secours, mais les nettoyages « à l'ancienne » devraient garder la
priorité. Avis et conseils de différents professionnels.
Danielle Perrin Frei vétérinaire :
« L'utilisation sporadique de lingettes humides pour laver un
chien peut-être pratique. De façon régulière, c'est plutôt
déconseillé. Le chien aura tendance à se lécher. Avec les produits
contenus dans les lingettes, cette ingestion peut être
problématique. De plus, avec les lingettes, on peut causer des
dégâts à la couche protectrice naturelle de l'animal. Le mieux
quand on rentre de promenade, c'est d'utiliser un chiffon sec, puis
de le brosser. »
Tony Santangelo, chef de vente COB
Bussigny : « Nous professionnels de l'automobile n'utilisons
pas de lingette. Nous utilisons tout simplement un rouleau de
papier, avec des produits adaptés. »
Depuis cet été, la TSR a dû passer
à la TNT, la télévision numérique terrestre. Certains
téléspectateurs ont dû adapter leur installation, seul moyen de
continuer à recevoir les chaînes suisses. Une téléspectatrice de
Collonge-Bellerive, dans le canton de Genève, nous a fait part de
sa mésaventure : en plus du strict nécessaire, son installateur
habituel lui a installé un système satellite pour quelques chaînes
supplémentaires. Un système, non-désiré, dont la facture s'avère
salée : 2.662 francs, TVA comprise !
Un montant astronomique et pas nécessaire.
Sept lingettes ont passé un test de Ktipp et Kassensturz repris
par ABE. Elles étaient évaluées en fonction de trois critères : la
résistance, la douceur et la présence d'additifs nocifs pour la
santé.
Le verdict :
- Duckies de Carrefour, doux,
résistant et sans additif douteux. Note : 6, la meilleure du test,
très bon.
- Charmin de Carrefour, très
résistant et aussi doux. Note : 5.9, très bon aussi. Ces deux
produits sont les plus chers du test : 10 francs les 100 lingettes
pour Duckies et 8,23 francs pour Charmin, soit 8 à 10 fois plus
cher que le produit testé le meilleur marché.
- M-Budget n'a pas été jugée assez
souple. Note générale : 4.3, suffisant.
- Lingettes humides de Denner avec
camomille ne sont pas très douces non plus. Note : 4.2,
suffisant.
- Coop Prix Garantie : souple et
résistant, mais le laboratoire a trouvé des formaldéhydes : 30 mg
par kilo. Note globale : 3.9, insuffisant.
- Soft, de la Migros : contient
aussi du formaldéhyde 48 mg par kilo. Note finale : 3.6,
insuffisant.
- Camomille, de Coop : 52mg par
kilo de formaldéhyde, et 19mg par kilo de composés halogénés
organiques. Résultat la plus mauvaise note du test 3,
insuffisant.