On n'avait pas encore osé tester les serviettes hygiéniques et les tampons périodiques: ABE l'a fait, avec l'aide d'un laboratoire spécialisé. Méthodes de contraception et possibilité de supprimer les règles feront aussi l'objet de cette émission.
Après la puberté et avant la ménopause, les femmes sont soumises à une contrainte biologique que l'on appelle la menstruation. Certaines parlent même de tyrannie de l'espèce. Chaque mois, il faut donc faire face aux règles. L'industrie a mis sur le marché un certain nombre de produits, serviettes hygiéniques et tampons périodiques, qui répondent aux besoins des femmes. Mais, comme pour tous les produits, il en existe toujours de mieux conçus que d'autres. Pour les différencier, il faut les tester. Personne jusqu'ici n'avait osé se lancer dans un test comparatif. ABE l'a fait. Mais avant de passer à la partie plus scientifique de l'émission, en cherchant de la documentation sur la question, nous sommes tombés sur un drôle de site internet signalant un étonnant musée avec son collectionneur un peu étrange. On n'a pas pu résister à l'envie de vous le montrer :
Internet est la vitrine idéale pour les collections en tous genres, mais on ne s'attendait pas à cela: "Museum of Menstruation & Women's Health", un site américain sur les règles (que vous pourrez consulter en cliquant sur le lien qui se trouve dans le colonne de droite).
Tout inusitée qu'elle soit, cette mine de renseignements de plus de 5000 objets anciens, permet de voir comment les femmes ont vécu avec leurs règles à travers les époques.
L'auteur du site, Harry Finley de Washington, veut d'ailleurs confier sa collection à un musée. Il nous présente quelques belles pièces, comme le tablier hygiénique en caoutchouc que la femme portait sous ses vêtements, datant de 1914, ou comme la serviette jetable que l'on connaît aujourd'hui, apparue dans les années 20, qui était retenue au moyen d'une ceinture. Un dispositif qui était encore utilisé il n'y a pas si longtemps. Ce n'est qu'au début des années 70 que les ceintures ont disparu. Les femmes ont pu par la suite coller la serviette à leurs sous-vêtements. Ce fut un développement important. Plusieurs femmes m'ont dit à quel point la ceinture était désagréable.
Parmi les objets de collection, ces surprenants récipients menstruels, dont un serait toujours sur le marché : le récipient en caoutchouc. Vous le pliez, l'insérez et il s'ouvre à l'intérieur. Il se remplit, vous le sortez, le videz, et le remettez.
Les premiers tampons commerciaux, apparus aussi dans les années 20, étaient des plus rudimentaires, et probablement même dangereux. Par exemple, sur les instructions du tampon Fax, qui n'avait pas de cordon pour le retirer, on y suggère que le tampon peut être porté pendant 48 heures, ce qui aujourd'hui mènerait directement la compagnie en procès. Cela montre bien le manque de connaissances médicales à l'époque.
L'utilisation des tampons ne se généralisera qu'après la deuxième guerre. Aujourd'hui, les tampons sont sécuritaires lorsque utilisés correctement. Mais ça n'a pas toujours été le cas.
En 1979, Procter & Gamble lance une nouvelle formule du tampon Rely, tellement absorbant, disait la publicité, qu'il permettait même d'absorber les soucis. Mais cette performance excessive fut associée à une catastrophe de santé publique. En 1980, des centaines de cas du syndrome du choc toxique ont été recensés. Une intoxication violente, fatale dans 5 à 10% des cas, dont le tampon peut être le déclencheur, comme l'explique Nevine El Sohl, chef de l'unité des staphylocoques de l'Institut Pasteur à Paris : "D'abord, il y a une fièvre très élevée. Ensuite, il y a une espèce de collapsus, on tombe, on est ramolie, on a une hypotension, il peut y avoir des syndrômes cutanés, des rougeurs.
Il faut qu'il y ait le germe qui produise cette toxine, et le germe, c'est le staphylococus Aureus. Il y a un certain nombre de personnes qui porte naturellement du staphylococus aureus au niveau de la muqueuse vaginale, c'est peut-être 20 à 30% de la population. Le caractère hyper-absorbant fait que le sang qui est autour est absorbé et que la bactérie à ce moment-là est mieux oxygénée".
Dans de rares cas, si la personne est dépourvue des anticorps pour se défendre, la bactérie prolifère et libère ses toxines dans le sang. En Suisse, aucun cas n'a été officiellement rapporté. Mais en Europe, le syndrome existe, même s'il est rare. "D'abord en France, il y a très peu de cas, et dans un des deux ou trois qui se sont manifestés en l'espace de dix ans dans notre centre de référence, eh bien, je peux vous dire que c'était une Américaine qui avait gardé son tampon pendant 7 jours. C''est quelque chose à ne pas faire. Il faudrait dans l'idéal changer les tampons trois fois par jour, mais pas trop fréquemment non plus, parce qu'on risque de léser la muqueuse."
Bien que les tampons d'aujourd'hui soient moins absorbants, donc plus sécuritaires que ceux des années 80, les femmes préfèrent de loin les serviettes. Selon Procter & Gamble, les tampons ne représentent que 22% des ventes d'hygiène féminine en Suisse. L'Europe du sud est encore plus réticente. Le tampon représente à peine 2% du marché italien.
Depuis quelques années, des documents, notamment diffusés via Internet, relayent les inquiétudes de plusieurs femmes à propos de traces de dioxine retrouvées dans les tampons et les serviettes hygiéniques. La dioxine étant très cancérigène, l'information avait de quoi inquiéter. Ce qui a été considéré comme une rumeur était en fait fondé. En effet, le procédé de blanchiment au chlore utilisé par les fabricants provoquait des dépôts de dioxine en quantité infime dans ces produits d'hygiène intime. Aucun lien n'a été établi entre cette présence de dioxine et des cancers, mais aucune étude scientifique n'a, à l'inverse, pu exclure ce lien. Comme on ne sait pas si c'est dangereux ou pas, il vaut mieux ne pas prendre de risque. Depuis quelques années donc, le blanchiment et la stérilisation des tampons et des serviettes se font au peroxyde d'hydrogène, c'est un produit similaire à celui qui est utilisé pour décolorer les cheveux par exemple, ou pour stériliser les verres de contact. Ce produit, en plus d'être moins polluant, ne dégage pas de dioxine dans l'organisme.
Comme quoi, quand on veut bien les chercher, il existe toujours des solutions industrielle moins néfastes.
Et pour contraindre les fabricants à améliorer leurs produits tout en aidant les consommateurs à faire des choix, il y a les tests réalisés par des laboratoires indépendants, comme celui que nous avons mandaté pour étudier la qualité des serviettes et des tampons.
Nous avons testé en laboratoire les performances d'un échantillon de sept des principaux tampons de taille normale en vente sur le marché suisse.
Pour évaluer l'absorption des tampons, la biologiste Armelle Davy-Bevilacqua, du laboratoire ATS à Aix-en-Provence, a utilisé une technique standardisée : "C'est une chambre qui est faite à l'aide d'un préservatif, autour de ce préservatif, il va y avoir une certaine pression d'eau, et cette pression d'eau va reproduire en fait le vagin, et on introduit le tampon à l'intérieur de ce préservatif, et en haut de ce préservatif va arriver du liquide, qui est du liquide normé, du liquide syngina. Et donc, à la première goutte qui fuit, on va avoir la capacité totale du tampon à absorber."
Ensuite, c'est en pesant le tampon que l'on connaîtra la quantité absorbée.
Cette capacité d'absorption devrait apparaître sur la boîte, sous forme de gouttes, selon une nouvelle norme volontaire. Une goutte signifie que le tampon absorbe 6 grammes de sang ou moins. Une inscription de deux gouttes indique une absorption de 6 à 9 grammes. Trois gouttes, 9 à 12 grammes. La norme prévoit jusqu'à six gouttes, 21 grammes, pour les tampons très absorbants.
"C'est très important, parce que la quantité d'absorption est en fait liée au SCT, en ce sens où l'on aurait établi une liaison éventuelle entre trop d'absorption pour le tampon et le syndrome du choc toxique. Il est donc vrai que ce serait très important pour la consommatrice d'être sûre qu'un nombre de gouttes corresponde à une quantité d'absorption selon la norme. Plutôt que de se fier à la taille, elle se fierait aux gouttes, et c'est vrai que ce serait un système plus sécurisant.
La deuxième chose qu'on a pu mesurer, c'est l'aspect sécurité du produit, à la pose et au retrait, c'est-à-dire tout ce qui est résistance du cordon à l'arrachement, à sec et à l'humide, après absorption, ça c'est important ; et l'aspect perte en fibre : est-ce qu'un tampon va sortir dans son intégralité ou est-ce qu'il va avoir tendance à laisser des peluches, ce qui est très dangereux, d'un point de vue infectieux"
Le test comporte donc plusieurs paramètres qui ont été traduits en mentions allant de très satisfaisant, à très insuffisant.
Voici les résultats, du meilleur au moins bon.
Le tampon Molfina normal, une exclusivité Migros, est très satisfaisant. Il ne perd pas de fibres et est bien dimensionné. Mais il ne respecte pas la norme d'absorption. L'étiquetage est erroné, car il indique deux gouttes, alors qu'il devrait en indiquer quatre. Nous avons demandé des explications à Charly Galley, responsable des achats non-alimentaires de la Migros.
"Nous avons choisi de mettre deux gouttes sur nos emballages, afin d'inciter la cliente à changer plus rapidement son tampon pour éviter des infections éventuelles, comme maintenant tous les principaux fabricants de marques et distributeurs de propres marques se sont mis d'accord afin qu'à l'avenir nous ayons des tampons type normaux. avec 9 à 12 grammes, nous allons pouvoir mettre trois gouttes comme tout le monde. Et cette adaptation de nos emballages se fera aux environs de septembre."
Le tampon Claretta de Denner obtient la mention correcte. L'emballage ne mentionne aucun degré d'absorption, mais à cause de sa taille, on s'attendrait à ce qu'il soit moins absorbant. Son diamètre augmente beaucoup après utilisation.
Le tampon OB, plus cher, obtient aussi la mention correcte. Il est surdimensionné par rapport aux autres, ce qui augmente son diamètre après utilisation. OB n'indique que deux gouttes, alors qu'il devrait en indiquer quatre.
Tout notre échantillon avait donc un problème d'étiquetage. Selon le laboratoire ATS, les capacités d'absorption sont trop élevées, "...dans la mesure où normalement un tampon doit avoir le minimum d'absorption possible pour le flux préconisé. C'est pour ça que l'on préconise d'utiliser le tampon le minimum absorbant pour le flux qu'on estime être le nôtre."
Tampax arrive en tête, avec la mention très satisfaisant. Il respecte la norme d'absorption et est bien dimensionné. Le bout arrondi de l'applicateur est bien conçu.
Le Molfina de Migros est satisfaisant en matière d'absorption et de solidité, mais son applicateur pose problème.
Selon Armelle Davy-Bevilacqua, "on observe un problème de structure du produit. On voit sur ce produit que les pétales ne remontent pas assez haut sur le tampon. Et en fait lorsque l'on positionne le tampon, il risque effectivement de venir pincer la paroi vaginale, ou alors de venir éventuellement se retourner, ce qui serait très désagréable. Donc on voit qu'il y a un problème de conception. Et on peut aussi rencontrer un problème lors de la pose du produit.
Migros, par l'intermédiaire de Charly Galley, reconnaît que son produit est mal conçu : Soucieux de la performance de nos produits, nous avons déjà envisagé la modification de cet embout, qui devrait entrer dans sa nouvelle version environ au mois de septembre dans la vente. Sa principale amélioration sera le bout du haut qui sera beaucoup plus fermé pour éviter entre autres ces blessures éventuelles."
En ce qui concerne la dangerosité du produit, "...il y a toujours une part de danger dans un produit, en tout cas, comme je vous l'ai dit, nous n'avons pas eu de réclamations, mais en effet, il vaut mieux être préventif et adpater cet article dès que possible. Mais à notre avis, et d'après le test que nous avons fait auprès de nos consommatrices, nous n'avons pas détecté un grand danger, ni même un danger potentiel."
Le Tampax Compak, le plus cher, obtient la mention correcte. Son applicateur en plastique est plus polluant. Son cordon est un peu court, et sa petite taille affecte sa performance en absorption.
Enfin, le OB est insuffisant. Sa taille plus grosse peut dérouter l'utilisatrice habituée aux tampons normaux. De plus, OB est désavantagé parce qu'il utilise la même technologie pour ses tampons avec applicateur et sans applicateur.
Pour Armelle Davy-Bevilacqua, "...cela implique un problème au niveau de la dilatation du produit. Parce qu'un tampon digital se dilate beaucoup plus en largeur qu'en longueur, du fait de son positionnement bas dans le vagin. Mais là, il va se trouver positionné beaucoup plus haut, à cause de la présence de l'applicateur. Au retrait, on risque d'avoir du mal à le retirer, ou d'avoir une gêne au retrait, vu sa grande dilatation en largeur et non en longueur."
Depuis quelques semaines, les nouveaux emballages de tampons OB ont été modifiés par le fabricant et indiquent le bon taux d'absorption. Mais il faudra attendre que les anciens stocks soient écoulés pour que tous comportent les indications conformes à la norme, pourtant voulue et instaurée par les fabricants eux-mêmes !! Et on ne peut pas dire que la société Johnson et Johnson soit spécialement rapide, puisque cette norme est entrée en vigueur en 1999 !
Bien que les tampons représentent une invention géniale et que les femmes qui les utilisent vous diront qu'elle ne pourraient plus s'en passer, vous l'avez entendu, leur utilisation n'est de loin pas universelle, pour des raisons culturelles principalement. Un grand nombre de femmes utilisent donc ce qu'on appelle des serviettes hygiéniques.
Et là encore, on peut se demander s'il y a des différences entre les marques qu'il serait utile de connaître avant d'acheter. Pour le savoir, nous avons également testé les serviettes.
L'attente principale des consommatrices est l'absorption. Huit serviettes de marques différentes ont donc été testées à l'aide de mannequins reproduisant fidèlement un usage normal de jour avec un flux constant.
Là encore, c'est au moment de la première fuite que l'on cesse d'injecter le plasma synthétique, afin de connaître la quantité exacte absorbée.
La dernière épreuve mesure l'adhérence de la serviette au sous-vêtement à l'aide d'un dynamomètre. Si la serviette colle trop, elle peut abîmer le sous-vêtement, tandis que l'inverse affectera sa performance.
Enfin, les voiles de surface, directement en contact avec la peau, varient d'une marque à l'autre.
On a pu observer deux types de voiles de surface : ceux qui ont un toucher textile et ceux qui ont un toucher plus plastique. Ces derniers ont tendance à être un peu plus occlusifs, donc à provoquer un peu plus la transpiration, surtout dans les pays chauds ou pendant la saison chaude. Les touchers textiles ont tendance à être un petit peu plus « respirables », c'est-à-dire qu'ils laissent un peu plus circuler l'air. Il serait bien que les consommatrices puissent choisir leur type de voile de manière plus claire.
Voici ci-dessous les résultats, du meilleur produit au moins bon.
Serviettes classiques épaisses
La serviette Molfina de Migros obtient la mention satisfaisante. Bonne tenue et bonne absorption. Son voile de surface a un fini plastique, mais ses barrières latérales ont un fini textile.
La Serena n'obtient que la mention correcte. Elle un fini textile, mais n'a pas d'ailettes. Sa mauvaise tenue au porter affecte sa performance.
Serviettes ultra-minces
La serviette Ria, achetée à l'EPA, obtient la note satisfaisante. Mais son voile de surface en polyéthilène est moins confortable que le toucher textile. Ce produit est plus difficile à positionner.
Selon le laboratoire, comme elle a les ailettes repliées sur le dessous du produit, "lors du positionnement, c'est vrai que c'est un désavantage parce que la consommatrice va commencer par enlever l'adhésif du dessous, et les ailettes pliées sur le dessous vont avoir tendance à venir se replier sur l'adhésif."
La Claretta de Denner obtient aussi la note satisfaisante. Son voile de surface est de type textile. Bonne absorption, bonne tenue, et c'est la moins chère.
Même résultat pour la Linda, une exclusivité Coop, elle aussi satisfaisante. Son voile en polyéthylène perforé est cependant un peu plus occlusif.
La Always, la plus chère de l'échantillon, est aussi satisfaisante, mais ses ailettes sont un peu trop larges. Always offre l'emballage « Clean Pack » : l'adhésif de la serviette est collé directement sur l'emballage, plutôt que sur un papier au silicone. Moins polluant.
La Helen Harper, une exclusivité Jumbo, est de qualité satisfaisante comme les autres. Le voile de surface est en polyéthylène moins confortable. La serviette est aussi offerte en Clean Pack.
Enfin, la Kotex Camelia n'obtient que la note correcte parce qu'elle absorbe moins. De plus, la Camelia protège moins bien contre l'humidité. Avec cette serviette, plus sophistiquée que les autres, Kotex a perdu son pari.
"Dans sa conception, c'est l'une des plus complexes. Elle contient une succession de quatre couches différentes. Le produit en lui-même a l'air confortable et bien fini, mais au niveau de ses performances, il n'est pas à la hauteur de son design. Apparemment, le liquide a du mal à pénétrer, et la fuite est prématurée."
Vu le peu de différences de performances de ces serviettes hygiéniques, autant choisir la moins chère, la plus confortable ou la plus pratique, selon ses critères personnels.
Cela dit, même si les fabricants affirment travailler afin d'améliorer le confort des femmes, il reste que les règles, pour beaucoup, sont un mauvais moment à passer tous les 28 jours en moyenne, comme les changements de lune. Très souvent, les règles sont accompagnées de symptômes désagréables et douloureux. Certains contraceptifs atténuent ces symptômes, diminuent l'intensité des règles, et parfois, chez certaines femmes, les suppriment complètement. C'est le cas de pilules progestatives, de certains stérilets ou d'implants sous-cutanés. Cela vaut la peine d'interroger son gynécologue sur les nouveautés et de se faire expliquer les avantages et les inconvénients de toutes ces méthodes. Il n'existe pas de contraception idéale, cela se saurait, mais plus on a d'informations, plus on a de chances de trouver la méthode la plus satisfaisante pour soi.
Depuis quelques années, des scientifiques, des femmes en particulier, se demandent si l'on ne pourrait pas généraliser ce qui se fait officieusement : à savoir, supprimer les règles durant plusieurs semaines.
Aux Etats-Unis, un centre universitaire de gynécologie mène une grande étude auprès de centaines de femmes qui ont accepté volontairement de prendre une pilule contraceptive classique, mais de telle sorte que la fréquence des règles est sensiblement réduite.
Jane Faircloth fait partie d'un groupe de 1600 femmes américaines qui participent à l'expérience du Jones Institute, dans l'Etat de Virginie.
Elle prend un contraceptif qui ne déclenche ses règles que quatre fois par année. C'est d'ailleurs ce qui a donné son nom à la pilule : la "seasonal", ou si l'on veut, la saisonnière.
L'étude se déroule selon un protocole établi par les autorités américaines. L'école de médecine veut pouvoir la mettre sur le marché dès qu'elle aura démontré son innocuité.
Et jusqu'à maintenant, les participantes tolèrent bien la saisonnière.
L'étude est supervisée par le docteur Freedolph Anderson. Il fait partie du nombre grandissant de scientifiques affirmant que 13 règles par année, c'est trop : "Les menstruations ne sont pas nécessaires en tant que telles. Elles sont un phénomène naturel, mais qui n'est que le résultat d'une absence de conception. L'utérus saigne parce que l'ovule de la femme n'a pas été fécondé. Mise à part cela, les règles n'ont aucune autre fonction. Une femme peut ne pas avoir ses règles pendant des années avec différents moyens de contraception, et le jour où elle reprendra son cycle normalement, elle pourra être enceinte et avoir un cycle normal."
Comme les femmes prenant la pilule n'ovulent pas, leurs règles sont donc déclenchées de façon artificielle lorsqu'elles cessent la prise d'hormone le 21ième jour. Une sorte de simulation qui n'a rien à voir avec l'horloge biologique.
Nous avons demandé l'avis d'un clinicien gynécologue genevois, le Docteur Michel P. Huber: "Je crois que ce qu'il faut comprendre, c'est que les cycles de 28 jours que l'on connaît sous pilules classiques sont des cycles artificiels. Ce sont des cycles dont la longueur précisément est tout à fait arbitraire, on aurait pu les faire de 35 jours, mais il a été décidé, pour différentes raisons, de les faire de cette durée. Et ceci, probablement, dans le but d'imiter en quelque sorte la nature, mais les règles qui surviennent ne sont pas du tout naturelles. Par conséquent, on peut très bien fabriquer des cycles de 35 ou de 40 jours. La question est de savoir jusqu'où peut-on aller, c'est-à-dire quelle est la prolongation maximum au-delà de laquelle un certain nombre d'effets secondaires pourraient survenir."
La pilule saisonnière du Dr Anderson est composée de progestérones et d'œstrogènes, comme les autres pilules contraceptives. Mais une dose trop élevée d'œstrogènes peut faire augmenter les problèmes de coagulation du sang, ce qui peut créer des thromboses ou des problèmes cardiaques. Cette hormone est aussi associée au cancer de l'endomètre. La prise d'œstrogènes sur une plus longue durée soulève donc des questions : "Cependant, la dose totale annuelle d'œstrogènes de notre pilule saisonnière est plus basse que celle de plusieurs pilules contraceptives sur le marché en ce moment. Et ces pilules sur le marché sont déjà, elles aussi, à très faible dose. La pilule saisonnière ne devrait donc normalement pas créer de problèmes, mais nous devons en être sûrs."
Bref, au Jones Institute, on estime que cette étude n'est qu'une formalité. La saisonnière devrait être commercialisée dès 2003 aux Etats-Unis.
En fait, certaines femmes prennent déjà leurs pilules en continu, en enchaînant leurs plaquettes, pour supprimer leur règles, ou plutôt « les décaler » comme ont dit, pour les vacances, ou une compétition sportive, par exemple. Le Docteur P. Huber confirme : "...on sait que ça marche, et que ce n'est pas dangereux. Et il y a une demande de la part de nos patientes. Donc on sait que l'on peut le faire. On a l'habitude de dire à la patiente de ne pas répéter cela trop souvent et de limiter peut-être la prise continue de la pilule à deux mois, ou à deux mois et demi. Il est évident que si un certain nombre d'études scientifiques nous donnent le feu vert pour pratiquer de la même manière, mais de manière plus officielle et prolongée, je crois qu'on pourra le faire, et il y aura certainement une partie de notre clientèle qui sera intéressée par cette technique."
Il faut dire que la liste des problèmes de santé associés aux visites de la lune est longue : endométriose, migraines, douleurs abdominales, changements d'humeur, augmentation des problèmes rhumatoïdes, et surtout de l'anémie, un problème très fréquent. Sans parler du coût des tampons et des serviettes... et du paracétamol.
En passant du cycle lunaire à celui des saisons, les règles sont donc toujours associées en quelque sorte à un cycle de la nature. Sur le plan commercial, le concept pourrait séduire.
S'il est vrai qu'il faut se méfier d'éventuels effets secondaires liés à la prise d'hormones, car il n'est jamais anodin de prendre des hormones, pour beaucoup de femmes, avoir le choix d'espacer ou de supprimer les règles représente un réel progrès.
On peut d'ailleurs se demander pourquoi cette étude n'a pas été organisée plus tôt. Tout comme on peut se demander si la raison n'est pas la sous-représentation des femmes dans les équipes de recherches et la hiérarchie universitaire !
Si cette pilule contraceptive saisonnière vous intéresse, demandez à votre gynécologue de vous tenir au courant des conclusions de cette étude américaine.